Obstacle à l’unité nationale , le tribalisme camerounais est une véritable arme politique
De plus en plus virulent, le tribalisme touche toutes les couches de la société « Le vivre ensemble n’est pas une invention récente. Je me souviens de ces belles années, celles de ma jeunesse lorsque nous vivions comme une seule et même famille. Bassa, Bamiléké, Bororo, Béti ou Maka ce n’était pas un problème » raconte Julie âgée de 70 ans. Du haut de son mètre soixante, cette dame au teint claire affirme qu’ « on mangeait tous à la même table, jouons ensemble sans pour autant avoir de la haine pour l’autre à cause de sa différence. Ensemble nous allions au marigot puiser de l’eau pour nos parents et même ceux des voisins ». C’était la belle époque ! Poursuit-elle nostalgique.
Ce temps passé raconté avec mélancolie n’était pas jolie pour tout le monde. Selon maman Mbo comme l’appelle affectueusement ses proches est une retraitée, mère au foyer de 65ans « Le tribalisme a toujours existé » La mère de dix enfants vit à Douala. Après avoir passée 20 ans à Ebouko, un village près de Nkongsamba, « je me souviens que les gens du village de mon mari ne m’aimaient pas parce que je venais d’ailleurs. Juste pour cela « j’étais une pestiférée ».
Aujourd’hui le tribalisme est un fléau qui gangrène le Cameroun. Et ces abus de vocabulaire et d’interprétation s’épanouissent dans les réseaux sociaux ou des plates formes entières sont dédiées à des querelles tribales. Les échanges traduisissent la haine exacerbée par la campagne électorale d’octobre 2018 qui mettait face à face, le président Paul Biya originaire du Sud et le candidat Maurice Kamto originaire de l’ouest présenté comme son principal opposant.
Est-ce que le tribalisme est une construction coloniale que les dirigeants d’aujourd’hui utilisent pour assoir les dictatures ? N’est-il pas important de sortir de l’hypocrisie nationale qui consiste à dire qu’il n’y a pas de tribalisme ? Au regard de la recrudescence du phénomène, il faut véritablement se préoccuper du problème s’émeut maître Désiré Sikati pour qui le tribalisme exacerbé date de 1992 « Le Tribalisme au Cameroun est devenu un tribalisme d’Etat. Même les personnes qui s’expriment sur les réseaux sociaux sont conditionnés de façon inconsciente par le régime »
C’est dire que la question du tribalisme est une question qui fait qu’aujourd’hui notre pays a un problème de cohésion sociale. Le mal est pour plusieurs la conséquence des politiques d’intégration nationale. Certains estiment que le véritable problème c’est le gouvernement qui n’a pas de politique claire d’intégration nationale. Malgré la prolifération de discours de haine et de tribalisme, il n’y a eu aucune sortie du gouvernement à ce sujet. Toute fois, une question subsiste : la question du tribalisme ne serait pas une diversion par rapport au véritable problème de la crise anglophone ?